Initiative cantonale « Un Jura aux salaires décents »

Conférence de presse du comité d’initiative, jeudi 31 janvier 2013, 14h00

Pierluigi Fedele, secrétaire régional, Unia Transjurane

 

Mesdames et Messieurs,

 

Unia a eu à maintes reprises l’occasion de dénoncer cette situation: les salaires dans notre canton subissent une pression massive et les cas d’abus et de sous-enchère salariale se multiplient.

 

Au niveau national, 10% des salarié-e-s vivent avec moins de 4000 francs de salaire par mois. Cette proportion est pour le moins doublée dans notre canton. Toutes les données tendent à démontrer la difficulté croissante d’un nombre toujours plus important de personnes de pouvoir vivre de leur travail (subvention caisse maladie, niveau d’endettement, enquêtes salariales…)

 

Cette situation n’est plus admissible. Les secteurs les plus touchés sont l’industrie et le secteur tertiaire. Une majorité de femmes sont victimes de cette politique salariale. Il est plus que fréquent de trouver des salaires en-dessous de 4000 francs, avec une proportion importante de salaires autour des 3000 francs et l’apparition de salaires en-dessous de 3000 francs bruts par mois ! Le qualificatif de salaires de misère est donc de mise.

 

La référence des 4000 francs est utilisée depuis le lancement et le dépôt de l’initiative syndicale pour un salaire minimum. Cette référence ne tombe pas du ciel. L’OCDE elle-même recommande cette méthode pour qualifier le minimum vital (2/3 du salaire médian national).

 

Les raisons de la pression sur les salaires sont multiples. Nous pouvons en mettre 4 en évidence :

 

1.    Le niveau des salaires à de tous temps été très bas dans le Jura. Le prétexte du niveau de vie dans le canton est servi pour justifier cet état de fait.

2.    La pression exercée par la libre circulation des personnes est utilisée pour faire pression sur les salaires de l’ensemble des travailleurs.

3.    Le taux de conventionnalisation des entreprises est insuffisant, moins de 50% dans l’horlogerie par exemple.

4.    Les crises à répétition sont utilisées comme prétextes pour justifier les pressions, même dans des branches qui ne sont pas touchées par la crise (p. ex. dans l’horlogerie)

 

Pour contrer cette évolution négative, il n’existe que deux mesures :

 

1.    Des CCT intégrant des salaires minimums et couvrant l’ensemble des secteurs et branches.

2.    A défaut, un salaire minimum légal.

 

L’initiative de la JSPJ à l’énorme avantage de présenter les deux alternatives :

 

1.    Incitation forte à la signature de CCT comprenant des salaires minimums.

2.    A défaut, définition par l’Etat d’un salaire minimum légal.

 

Un des principaux arguments des représentants du patronat régional est de dire que le salaire minimum imposé représente la fin du partenariat social. Cet argument est emblématique de l’hypocrisie qui règne autour de ces questions dans les milieux économiques de la région. Pour deux raisons principales :

 

1.    L’initiative incite fortement à la signature de CCT. Les opposants ne parlent que du salaire minimum légal, qui est l’option subsidiaire. Pourquoi n’abordent-t-ils pas la question des CCT avant ? Car ils n’ont aucune intention de s’inscrire dans une logique de partenariat social à large échelle. Malgré les déclarations de façade.

2.    Le niveau de couverture des entreprises par une CCT devrait inciter le patronat à plus de retenue dans les discussions sur le partenariat social dans la région. Car c’est un sujet qu’ils connaissent fort peu… par manque de pratique certainement!

 

La situation conventionnelle dans le Jura est la suivante :

 

Secteur secondaire (à l’exception des métiers du bâtiment)

 

?     590 entreprises industrielles, toutes branches confondues, représentent 12 280 emplois.

?     Sur ces 590 entreprises, environ 80 sont soumises à CCT : 70 dans la CCT horlogère, 5 dans la CCT MEM et 7 dans des CCT régionales d’entreprise, sans salaire minimum pour ces deux dernières catégories.

?     86,5% des entreprises industrielles du canton ne sont pas soumises à une CCT.

?     88,2% des entreprises industrielles du canton n’ont pas de salaire minimum de référence.

 

Secteur tertiaire (privé)

 

?     1198 entreprises répertoriées, représentant 5464 emplois

?     Sur ces 5464 emplois, seuls une minorité de salarié-e-s sont sous CCT

 

Les entreprises sous CCT avec salaires minimums :

 

-       Dans l’hôtellerie-restauration : 291 établissements, 1111 emplois

-       Par contre, dans le commerce de détail (778 entreprises, 3546 emplois), dont seulement ces quelques commerces sous CCT:

 

?     COOP : 10 succursales, représentant environ 150-170 employé-e-s

?     Migros : 4 succursales, représentant environ 120 employé-e-s

 

 

La situation est assez claire. Et les problèmes rencontrés le sont majoritairement dans ces secteurs d’activités. Unia va organiser, ces prochaines semaines, des manifestations de dénonciation de situations scandaleuses !

 

Cette tendance est indigne du pays le plus riche et le plus productif au monde !

 

Dans le cadre de la libre circulation des personnes, des mesures d’accompagnements ont été prévues par les autorités fédérales pour protéger les conditions de travail et salariales en Suisse.

 

Ces mesures ne suffisent pas à endiguer le phénomène.

 

Nous appelons le peuple jurassien à décider lui-même des mesures d’accompagnement réellement efficaces, en votant OUI massivement le 3 mars prochain à l’initiative sur les salaires minimums.